samedi 15 novembre 2008

La Solitaire - sixième partie

J'avais allumé un feu et faisait rôtir un lapin quand Breval s'éveilla. Une fois éloigné des marécages, le paysage redevenait plus agréable, plus semblable à la forêt de Cérez et sa région. J'avais suivi un cours d'eau qui m'avait emmenée sur une vallée, où l'herbe sous mes pieds, poussait drue. Des aulnes et quelques grands chênes nous protégeaient du soleil de la mi-journée. « Ai-je dormi ? » murmura le héros, incertain. Puis, se levant brusquement sur le brancard, il posa sa main sur son front.
« Ma tête... est douloureuse...
- Oui. Je vous ai assommé !
- Assommé ? En quel honneur, chère dame ?
- Ça n'a pas d'importance, il le fallait, c'est tout. »

Il ne posa pas plus de question, à mon grand étonnement. Nous mangeâmes le lapin, puis des baies sucrées que j'avais ramassées en chemin. Cette petite halte dans un endroit plus avenant que ceux visité plus tôt était très reposante. Mais bientôt nous reprîmes notre route.

L'après-midi fut tranquille, nous avions traversé toute la vallée verdoyante sous un beau ciel bleu où les oiseaux volaient et chantaient, insouciants. Et pourtant, je songeais à Solena et à la licorne que nous avions laissées avant les marais... j'avais hâte de faire la chemin en sens inverse... sans Breval... Certes, je m'étais habituée à sa présence, il ne me dérangeait plus... mais... le retour serait plus agréable, sans aucun doute. Nous nous approchions d'un bois, la porte que cherchait Breval était probablement au cœur même de l'endroit. « Je ne connais pas ce lieu, mais il me paraît assez calme ! » lui dis-je avec un geste du menton. « Dites-moi Ara... commença-t-il d'un ton grave, qui me fit frissonner. Avez-vous déjà entendu parler de la légende des Amazones...
- Bien sûr, mais une légende... c'est loin d'être une légende, ces femmes existent ! Mais je croyais que vous ne saviez rien sur mon monde !
- En effet ! Elle vient du mien... mais, vous dites... » il s'arrêta et me dévisagea longuement, les sourcils froncés, avant de reprendre : « Et où vivent-elles ?
- Je ne vous le direz pas... personne ne le sait et ne doit le savoir.
- Vous étiez l'une d'entre elles... la mélodie pour appeler la licorne ! Pourquoi être partie ? »

Je lui fit signe de continuer à avancer. « C'est vrai, oui. Leurs us et coutumes ne me convenaient plus, alors je les ai fuies... Comment avez-vous deviné, Breval ?
- Vous êtes une guerrière... et je ne connais qu'une sorte, aussi légendaire soit elle, de femmes guerrières et ce sont les Amazones !
- Les Amazones ne sont pas seulement des guerrières. Il s'agit d'une véritable société, très bien organisée : il y a les chasseuses, les prêtresses, les danseuses...
- Des danseuses ?
- Oui, elles travaillent avec les prêtresses, font des danses rituelles pour les grandes occasions ou tout simplement pour animer la vie du campement. Il y en a d'autres qui ne s'occupent que de la bonne marche du campement, qui cuisinent, construisent des armes, des abris, des outils, élèvent les enfants... et puis il y a la reine... voilà. dis-je simplement avec un sourire triste sur les lèvres.
- Les enfants... de la reine ? La légende dit que vous tuez les enfants mâles ? demanda Breval.
- Toutes les Amazones ont des enfants. Et... ce n'est pas une légende... malheureusement.
- Les hommes aussi sont.... » Il ne termina pas sa phrase car il me vit détourner le regard, dégoûtée. J'avais les larmes aux yeux et la rage qui m'avait autrefois poussée à m'enfuir de leur campement s'échappa de mon coeur où je l'avais bien enfouie, pour se disperser dans tout mes muscles, qui se crispèrent.Maintenant il savait, il connaissait mon passé. Cela faisait tellement longtemps... et je n'en avais jamais parlé à personne.

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